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Mali : Hollande ''l’Africain'' et le retour de la Françafrique ?
Retour sur le rôle de François Hollande dans l'intervention française au Mali
Par Lucien Pambou le 06/02/2013

François Hollande avec le président malien Dioncounda Traoré
Selon le journal Sud-Ouest, Hollande c’est l’Africain comme le journal l’indique à la une. Sur l’intervention de la France au Mali, il y a un quasi consensus de la classe politique française de Droite et de Gauche. Hollande, que certains dans son camp ont considéré comme indécis, fluctuant, recherchant systématiquement la synthèse, a gagné ses galons de commandant en chef en envoyant l’armée française défendre les balbuties de démocratisation politique dans un pays comme le Mali qui révèle toutes les tares d’une « démocratie tropicale ».

Par démocratie tropicale, j’entends un pays dans lequel les valeurs universelles de liberté, de paix, de droit sont domestiquées dans un contexte de tropicalisation de la gouvernance. On s’affranchit quand on veut des règles de droit. Le gouvernement est souvent juge et parti.

Hollande, que certains dans son camp ont considéré comme indécis (...) a gagné ses galons de commandant en chef en envoyant l’armée française au Mali
Lucien Pambou


Hollande l’Africain aurait-il restauré son autorité interne grâce à l’action extérieure justifiée par l’intervention de l’armée française au Mali ? Rien n’est sûr car si la droite reconnait l’autorité du Président dans sa prise de décision, la droite française, malgré ses divisions, continue de dire que le Président Hollande est incapable sur de nombreux fronts, comme la réduction des dépenses publiques, ses prises de décisions concernant le système fiscal et le mariage pour tous. Sur le front du chômage, même s’il y a un léger répit, Hollande recueille l’incapacité des gouvernements qui l’ont précédé pour résoudre au fond la question du chômage.
Hollande étant aux affaires, il est donc forcément dépositaire de l’indécision et de l’incapacité des gouvernements précédents pour apporter des réponses réelles à l’augmentation du chômage. Néanmoins, en allant au Mali, Hollande a réussi un tour de force : l’unité du pays France quant à l’intervention au Mali et des critiques faibles par rapport à la présence continue ou non des forces françaises au Mali. Le commandant en chef Hollande a été clair : on reste.

On reste signifie que la France va parachever sa mission militaire par une mission politique en obligeant les protagonistes de la classe politique malienne à organiser des élections justes et équitables qui intégreraient la question touareg qui dure voici quasiment50 ans.

Hollande l’Africain aurait-il restauré son autorité interne grâce à l’action extérieure justifiée par l’intervention de l’armée française au Mali ? Rien n’est sûr(...)
Lucien Pambou


Cette stratégie de présence et de communication de Hollande sur le sol malien consacre-t-elle le retour de la Françafrique, système de relations vertueux/vicieux entre la France et ses anciennes colonies, système animé par les hommes politiques qui hier avaient pour nom Foccart et qui aujourd’hui sont dans les différents cabinets ministériels et dans les grandes entreprises françaises comme Total, Vinci, Bolloré qui œuvrent pour le maintien de la présence française en Afrique ? En arrivant aux affaires le Président Hollande a dit vouloir couper le cordon ombilical avec la Françafrique.

Les Maliens ont acclamé le président français
Comme toujours les paroles passent et les actions demeurent. Hollande a été rattrapé par la réalité, la réalité des rapports consanguins entre la France et ses anciennes colonies. Il y a des intérêts français à protéger dans cette partie du Sahel, il y a d’abord des intérêts humains, les otages qu’il faut sauver coûte que coûte, ensuite on peut remonter vers les intérêts économiques marqués par la présence d’Areva (uranium au Niger), de Total (pétrole en Mauritanie avec des gisements prometteurs).

Papa Hollande est de retour. Voilà comment il a été accueilli par les foules en liesse à Tombouctou et à Bamako. Il a reçu en cadeau un chameau et de vaches, marque d’hospitalité de populations qui expriment leur satisfaction car elles ont été brimées par les troupes Jihadistes terroristes de Ansar Din, Aqmi (Al Qaïda Maghreb islamique) et du Mujao (mouvement unifié pour le Jihad en Afrique de l’ouest qui souhaite islamiser l’ensemble du continent africain par l’application d’un Islam rigoureux proche).

En manœuvrier politique habile, Hollande a justifié l’intervention française par la nécessité de défendre les valeurs universelles de liberté et de droit mais aussi comme une volonté de sauver le peuple malien dont une partie des anciens a combattu en 1914/18 et en 1939/45 pour défendre la mère patrie France contre le nazisme.

Papa Hollande est de retour. Voilà comment il a été accueilli par les foules en liesse à Tombouctou et à Bamako
Lucien Pambou
Cette habileté politique ne résout pas le succès rapide de l’armée française qui n’a pas trouvé d’armée terroriste prête à croiser le fer, armée dont on disait qu’elle était bien équipée, mais qui malheureusement sur le terrain a du battre retraite vers la partie montagneuse de l’est du Mali dans les Ifoghas. Une autre guerre commence pour François Hollande et l’armée française.

Il faut aller déloger les terroristes dans les grottes des Ifoghas tout en veillant à la préservation de la vie des otages français. Pour l’instant, l’Union européenne est absente, elle se contente de dire qu’elle va former une armée malienne quasi inexistante. Les forces armées africaines (en dehors du contingent tchadien, 2000 hommes qui finalement sont les représentants que la garde prétorienne du Président tchadien Idriss Déby) se font attendre.

La France est obligée d’être seule dans cette nouvelle guerre de terrain et de guérilla qui commence même si les services de renseignement MI6 anglais sont sur place, tout somme les services de renseignement allemands ainsi que la logistique américaine et anglaise en matière de ravitaillement des aéronefs.
Sur le plan politique, François Hollande souhaite des élections politiques en juillet. Comment la France arrivera-t-elle à mener le problème touareg dont les responsables souhaitent une autodétermination dans un nouveau Mali.

Les autorités de Bamako, elles, ne veulent pas entendre parler de cette autodétermination et souhaitent une unité du territoire. Le Président Hollande demande que les vengeances personnelles, surtout à l’endroit de populations d’obédience arabo-touareg, soient exclues et que la justice soit le nœud gordien de la résolution du conflit.

Le gouvernement transitoire malien est incapable de faire respecter la loi sur son territoire tant au niveau des biens que des personnes. Et quel sort sera réservé au Capitaine Amadou Sanogo qui pour l’instant n’est pas au combat, se terre dans ses quartiers militaires ? Amadou Sanogo est le putchiste qui a arrêté le processus de démocratisation en marche au Mali.
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